2014-08-14 15:19:00

L'Eglise sud-coréenne, dynamique mais qui connaît des difficultés


(RV) Entretien - La dernière visite d’un Pape en Asie orientale remonte à 1999. Jean-Paul II se rendait alors en Inde. En allant en Corée du Sud, le Pape François met donc fin à une longue absence dans cette région où l’Eglise catholique est en pleine expansion. Il va ainsi à la rencontre d’une Eglise coréenne particulièrement dynamique : cent mille personnes environ sont baptisées chaque année.

Cette Eglise, le père Gilbert Poncet, prêtre des Missions étrangères de Paris (MEP), qui vit en Corée du Sud depuis 1968, la connaît bien. Il l’a vue évoluer, croitre. Travaillant depuis une quinzaine d’années au sein du séminaire majeur de Daejon, il a également pu suivre le travail de formation des futurs prêtres sud-coréens. Interrogé par Xavier Sartre, il revient avec lucidité sur cette Eglise, certes dynamique, mais qui n’est pas exempte de problèmes

L’Église de Corée est une Église magnifique qui a encore de l’énergie mais elle a les mêmes maladies que l’Église en Europe. Le nombre de baptême diminue régulièrement et les baptisés s’attiédissent beaucoup. Pour parler de la pratique, les participations à l’eucharistie sont en grande diminution et les vocations, aussi bien religieuses que pour le séminaire, diminuent également. Il y a une dizaine d’années, il y avait 1500 séminaristes en Corée et aujourd’hui, il n’en reste que 1264 et les entrées prochaines diminuent beaucoup. C’est une église qui est encore vivante, branchée sur l’avenir et qui a une foi importante mais qui a des problèmes dûs à l’individualisme et au système de l’enseignement qui forme des gens susceptibles de gagner un peu d’argent parce qu’ils savent que deux et deux font quatre mais qui fondamentalement, n’ont pas un profond enracinement culturel et religieux.

Quel est le profil type du séminariste ? Est-ce qu’il y en a un ou est-ce qu’au contraire, les séminaristes viennent de toutes les couches de la société et de tous les secteurs de la société coréenne ?

Ils viennent un peu de tous les secteurs mais l’Église de Corée est une Église de classe moyenne ou de classe même un peu haute. Donc, il n’y a pas de fils d’ouvriers ou de gens comme cela. Le problème, c’est que ce sont souvent les familles qui ont une vocation et n’ont pas l’intéressé, ce qui pose des problèmes du point de vue de la formation.

Un autre problème important pour ce qui est de la formation au séminaire, c’est que maintenant, les jeunes qui arrivent après leurs études secondaires sont dans un état lamentable, c’est-à-dire qu’au point de vue humain, ils n’ont aucune formation, ni morale ni religieuse et ils sont extrêmement marqués par les moyens actuels de communication dans ce qu’ils ont de plus mauvais. Par exemple, on a réalisé une enquête et on s’est aperçu que les enfants à partir de 10 ans avaient tous eu l’occasion de voir tous les jours du porno dans leurs moyens de communication. Cela pose donc des tas de problèmes. Aujourd’hui, au séminaire, on est en vacances et on a une vingtaine de jeunes à qui on essaye de donner une vision de la sexualité qui soit un peu évangélique.

Les entrées au séminaire sont souvent le fait d’une vision sociologiquement fausse du sacerdoce, c’est-à-dire que c’est une société qui a des difficultés économiques. C’est quand même une vie assez à l’aise, sans grandes difficultés. Donc, il y a ces choses-là qui jouent aussi.

Concernant la transmission de la foi, comment ont-ils reçu cette foi ? Qu’est-ce qui les a poussés à s’engager dans la prêtrise ?

Les sources, ce sont plus souvent la famille et la paroisse qui donnent aux jeunes une image du sacerdoce qui est surtout tournée vers les pauvres et pas suffisamment vers Jésus-Christ et l’Évangile. C’est donc un engagement social. Alors, il faut faire en sorte que la rencontre personnelle avec Jésus-Christ se fasse au moins pendant le séminaire mais en même temps, qu’ils gardent un œil sur la société pour laquelle ils veulent donner leurs vies. À mon avis, c’est la plus grosse difficulté.

Le Pape François se rend en Corée. Qu’attendez-vous de cette visite ?

À cause de cette sécularisation, il ne pourra pas donner le choc que Jean-Paul II avait donné il y a trente ans pour la canonisation des précédents martyrs. Je pense que les jeunes d’Asie sont quand même un peu l’avenir de l’humanité. Ils ne sont pas très nombreux mais ils ont quand même une force et il faut renforcer le rattachement à l’Église et leur montrer combien ils sont utiles dans l’Église et pour l’évangélisation en particulier. Je pense que la venue du Pape aura un effet certain.

Il n’y a pas longtemps, je suis allé dans un village et il y a un non chrétien qui m’a dit « Vous allez avoir de la visite ». Tout le monde attend de manière très sympathique la visite du Pape, d’autant plus que la Corée est moins visitée, avec le bateau qui a coulé et des tas d’évènements qui rendent les choses difficiles. L’Église catholique est quand même un pilier qui donne l’espoir à beaucoup de gens, chrétiens ou non-chrétiens. Le fait que le Pape François vienne passer quelques jours ici peut sûrement apporter quelque chose de très positif. 








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