2014-09-17 08:02:00

« Les chrétiens ne sont pas des pions » au Proche-Orient


L’avancée de l’État islamique en Irak, la crise humanitaire à Gaza, ou encore les millions de réfugiés syriens : autant de dossiers au centre des discussions à Rome de la conférence d’urgence de la Caritas Internationalis, dédiée aux crises au Proche-Orient, qui s’achève ce mercredi. Des discussions pendant lesquelles les organisations catholiques ont réfléchi au meilleur moyen d’aider ceux qui vivent ces tragédies.

Au Liban par exemple, les familles chrétiennes qui ont fui le nord de l’Irak, sont de plus en plus nombreuses, tout comme les Yazidis. Ces réfugiés s’ajoutent au plus d’un million de réfugiés syriens  et aux centaines de milliers de Palestiniens déjà présents dans ce pays de quatre millions d’habitants.

Face à cette situation dramatique pour la région et notamment pour le Liban, le père Paul Karam, le président de la Caritas Liban et l’un des participants de la conférence, attend beaucoup de la communauté internationale. Il est interrogé par Audrey Radondy

Comment ce petit territoire de 10.452 km² peut-il avoir toutes les capacités logistiques pour assumer ses responsabilités envers le grand nombre de réfugiés se trouvant sur son territoire ?

Je pense que la Communauté Internationale doit intervenir urgemment pour mettre fin à cette tragédie qui touche tous les pays du Proche et du Moyen-Orient. Au 21° siècle, on ne peut plus accepter d’avoir un tel scénario qui divise tous ces pays et imposer une nouvelle politique ou une nouvelle présence qui est hors de la conception humaine et qui va au-delà du respect des droits de l’homme, du respect de l’être humain et du respect du culte religieux. Toutes ces questions sont posées à la Communauté Internationale.

On voit que la Communauté Internationale se mobilise plus ces derniers jours. Comment voyez-vous cette mobilisation ?

Malheureusement, on voit que dans la politique, il y a toujours des intérêts personnels.  Et ce sont les populations qui paient le prix de ces politiques. À mon avis, il faut prendre en compte l’intérêt de tout le monde. Si l’on fait primer l’intérêt économique, l’intérêt politique ou l’intérêt des États en ce qui concerne les échanges commerciaux, on n’arrive nulle part. D’ailleurs, on voit que quand ce sont les intérêts personnels qui ont primé, il y a eu des résultats négatifs sur toutes les populations, notamment celles de la région. Prenez seulement un petit exemple. Cela fait 60 ans que la cause palestienne n’a toujours pas été  résolue. Maintenant, nous sommes dans la troisième année et au seuil de la quatrième de la crise syrienne. On se pose la même question pour l’Irak. Est-ce qu’on va attendre plusieurs années ? On a déjà eu cette expérience où les enjeux politiques se jouaient sur les territoires libanais pendant plus de dix-huit ans. Et jusqu’à présent, tous ces problèmes n’ont pas été résolus. J’attends vraiment qu’il y ait une justice qui fasse respecter les droits de l’homme, les droits des communautés religieuses et en particulier, les chrétiens. Il faut le dire à haute voix. Les chrétiens ne sont pas des pions à jeter ici et là dans le Proche-Orient.

Concernant l’aide à apporter, on voit que c’est quelque chose qui se passe sur des semaines, des mois voire des années. Comment pensez-vous répondre à ces besoins ?

Il y a bien sûr un grand problème au niveau humanitaire car il y a maintenant une chute des donations. Et en même temps, il y a une crise internationale à ce niveau-là. Des millions de personnes sont menacées. Comment la Communauté Internationale peut-elle assumer ce lourd poids ? Même les Nations-Unies ne peuvent pas assumer ce poids à elles-seules. Dans la conférence du Koweït, au début de la crise syrienne, on n’a même pas pu apporter le chiffre qu’on prévoyait.

Comment peut-on assumer tout cela avec la crise syrienne, la crise irakienne, Gaza et le Liban ? Maintenant, on a le problème ukrainien et il y a aussi l’Afrique. Il y a vraiment un problème au niveau des Nations-Unies où il faut faire une sorte de plaidoyer pour mettre fin à toutes ces politiques erronées des régions. On est en train de faire rentrer les choses arbitrairement. Et on n’en finit pas ! On a donc un gros problème au niveau de l’aide humanitaire. On a un énorme problème au niveau du Liban. Les réfugiés arrivent au seuil du même nombre que la population libanaise. Déjà que notre peuple devient de plus en plus pauvre, alors, que faire ?

 

 








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