2014-11-21 16:14:00

Les technosciences en discussion aux Semaines sociales de France


(RV) Entretien - Aujourd’hui, les nouvelles technologies imprègnent notre quotidien et simplifient nos vies… mais, hommes ou robots, on peut être effrayé ou fasciné de deviner lesquels seront les plus nombreux dans les prochains siècles. En allant au-delà des idées reçues, la session des Semaines sociales de France propose cette année de débattre sur le thème : « L’homme et les technosciences : le défi ». Le rassemblement de l’association s’est ouvert ce 21 novembre à l’Université catholique de Lille. Jusqu’à dimanche, 70 intervenants sont attendus pour confronter leurs points de vue.  

Jérôme Vignon est président des Semaines sociales de France depuis 2007. Il nous précise la nature du défi posé par les technosciences.

Un défi est posé à la liberté humaine. Soit, elle s’abandonne à la toute puissance de la science, considérant que l’interconnexion des réseaux, l’intelligence artificielle et la robotique vont finalement pouvoir mieux décider que l’homme lui-même qui est incertain, qui n’est pas fiable, dont les politiques sont corrompues. Et donc, c’est l’hypothèse de la démission. Soit il choisi, au contraire, de les maîtriser,  les réguler,  les encadrer à la fois par les individus et par leurs organisations, y compris politiques et donc, de renoncer à toutes les possibilités qu’offrent en principe la science qui est un véritable défi. Dans le contexte de préférence pour soi par rapport à la collectivité, au nom de quoi vouloir mépriser les applications des technosciences sinon au nom de la conscience que nous avons d’un bien commun ? Le défi, c’est que cette conscience ne soit pas suffisamment forte. Il y a un pessimisme aussi : comment maintenir notre confiance dans les capacités humaines à être le sujet des technosciences et non pas leur objet ?

Donc, c’est finalement un regard assez méfiant et réticent porté sur les nouvelles technologies ? 

Non, c’est un regard qui constate d’abord qu’elles sont là en tant que produit de l’intelligence humaine. Les robots intelligents ont d’abord été conçus par des ingénieurs, par des hommes. Donc, notre attitude de défi aux semaines sociales, c’est d’abord une attitude de curiosité, de découverte, d’écoute, d’attention et de bienveillance puisqu’il s’agit de création par l’homme. En même temps, cette attitude est mêlée de vigilance. A quoi ça va servir ? Au service de qui ? Les grandes entreprises, est-ce qu’elles vont être elles-mêmes contraintes par des régulations à suivre le bien-commun ou est-ce que leur puissance sera telle qu’elles vont avoir une emprise sur les individus ?

Non, notre regard n’est pas pessimiste. Il est d’abord curieux, comme celui-ci du Concile Vatican II. Il y a beaucoup d’espoirs qui sont liés à ces technosciences. À quelles conditions ? Du point de vue de la maîtrise par l’homme, de la centralité au sens de l’encyclique Populorum Progressio, comment est-ce que l’homme peut continuer d’être au centre de ce nouveau développement, à certains égards, vertigineux, que nous propose et parfois tente de nous imposer les technosciences ?

Vous nous avez parlé du Concile Vatican II, de l’encyclique Populorum Progressio. Est-ce que le chrétien a finalement un rôle particulier dans ce monde où les technosciences ont toujours plus de place ?

Un de nos maîtres dans cette direction, c’est Pierre Teilhard de Chardin qui avait déjà pressenti que le monde scientifique faisait des pas de géant mais que ces pas manquaient d’un souffle spirituel. C’est aussi un peu notre attitude. Les progrès des technosciences implorent la présence de l’amour humain, la possibilité que toute cette capacité puisse être mise au service de l’homme. Une forme de transhumanisme dit que l’homme est dépassé. Vous savez ce que disent les nouveaux prophètes, les technoprophètes quand on leur dit qu’est-ce que vous allez faire de tous ces hommes augmentés ? Que vont devenir ceux qui ne sont pas augmentés ? Ils répondent : les dinosaures, eux aussi...








All the contents on this site are copyrighted ©.