(RV) « L’unité entre croyants ne veut pas dire uniformité ou approbation. C’est ce qui arrive si nous voulons réaliser l’unité selon nos propres desseins humains. » Une idée développée par le Pape François dans l’homélie de la messe célébrée en la cathédrale catholique d’Istanbul, la cathédrale du Saint Esprit, en présence du Patriarche œcuménique Bartholomée 1er et des représentants de toutes les autres Eglises présentes en Turquie. « Seul l’Esprit Saint peut susciter la diversité, la multiplicité, et dans le même temps, réaliser l’unité ».
« Si nous voulons nous la diversité, et que nous nous enfermons dans nos particularismes, alors nous portons la division, et si nous voulons seuls réaliser l’unité, nous n’arrivons qu’à l’uniformité ». « Si par contre nous nous laissons guider par l’Esprit, la richesse, la variété, la diversité ne se transforment pas en conflit, parce qu’Il nous pousse à vivre la variété dans la communion de l’Eglise ». « C’est l’Esprit Saint qui fait l’unité de l’Eglise, dans la Foi, dans la Charité », a encore ajouté le Pape François qui exhortait l’Eglise et les Eglises à se laisser guider par l’Esprit Saint, dans une attitude de docilité et d’obéissance. »
Le compte-rendu de notre envoyée spéciale à Istanbul Romilda Ferrauto
Le texte intégral de l'homélie du Pape François :
À l’homme assoiffé de salut, Jésus dans l’Évangile se présente comme la source
où puiser, le rocher d’où le Père fait jaillir des fleuves d’eau vive pour tous ceux
qui croient en lui (cf. Jn 7, 38). Avec cette prophétie, proclamée publiquement à
Jérusalem, Jésus annonce à l’avance le don de l’Esprit Saint que recevront ses disciples
après sa glorification, c’est-à-dire sa mort et sa résurrection (cf. v. 39).
L’Esprit Saint est l’âme de l’Église. Il donne la vie, il suscite les différents charismes
qui enrichissent le peuple de Dieu et surtout, il crée l’unité entre les croyants :
de beaucoup il fait un seul corps, le corps du Christ. Toute la vie et la mission
de l’Église dépendent de l’Esprit Saint ; c’est lui qui réalise toute chose.
La même profession de foi, comme nous le rappelle saint Paul dans la première
lecture d’aujourd’hui, est possible seulement parce qu’elle est suggérée par l’Esprit
Saint : « Personne n’est capable de dire : “Jésus est Seigneur” sinon dans l’Esprit
Saint » (1 Co 12, 3b). Quand nous prions, c’est parce que l’Esprit Saint suscite la
prière dans notre cœur. Quand nous brisons le cercle de notre égoïsme, que nous sortons
de nous-mêmes et nous approchons des autres pour les rencontrer, les écouter, les
aider, c’est l’Esprit de Dieu qui nous a poussés. Quand nous découvrons en nous une
capacité inconnue de pardonner, d’aimer celui qui ne nous aime pas, c’est l’Esprit
Saint qui nous a saisis. Quand nous passons outre les paroles de convenance et que
nous nous adressons aux frères avec cette tendresse qui réchauffe le cœur, nous avons
été certainement touchés par l’Esprit Saint.
C’est vrai, l’Esprit Saint suscite les différents charismes dans l’Église ; apparemment,
cela semble créer du désordre, mais en réalité, sous sa conduite, cela constitue une
immense richesse, parce que l’Esprit Saint est l’Esprit d’unité, qui ne signifie pas
uniformité. Seul l’Esprit Saint peut susciter la diversité, la multiplicité et, en
même temps, opérer l’unité. Quand nous voulons faire la diversité, et que nous nous
arrêtons sur nos particularismes et sur nos exclusivismes, nous apportons la division ;
et quand nous voulons faire l’unité selon nos desseins humains, nous finissons par
apporter l’uniformité et l’homologation. Si au contraire, nous nous laissons guider
par l’Esprit, la richesse, la variété, la diversité ne deviennent jamais conflit,
parce que Lui nous pousse à vivre la variété dans la communion de l’Église.
La multitude des membres et des charismes trouve son principe harmonisateur dans
l’Esprit du Christ, que le Père a envoyé et qu’il continue d’envoyer, pour accomplir
l’unité entre les croyants. L’Esprit Saint fait l’unité de l’Église : unité dans la
foi, unité dans la charité, unité dans la cohésion intérieure. L’Église et les Églises
sont appelées à se laisser guider par l’Esprit Saint, en se plaçant dans une attitude
d’ouverture, de docilité et d’obéissance.
Il s’agit d’une perspective d’espérance, mais en même temps laborieuse, puisqu’il
y a toujours en nous la tentation de résister à l’Esprit Saint, parce qu’il bouleverse,
parce qu’il secoue, il fait marcher, il pousse l’Église à avancer. Et il est toujours
plus facile et plus commode de se caler dans ses propres positions statiques et inchangées.
En réalité, l’Église se montre fidèle à l’Esprit Saint dans la mesure où elle n’a
pas la prétention de le régler ni de le domestiquer. Et nous, chrétiens, nous devenons
d’authentiques disciples-missionnaires, capables d’interpeller les consciences, si
nous abandonnons un style défensif pour nous laisser conduire par l’Esprit. Il est
fraîcheur, imagination, nouveauté.
Nos défenses peuvent se manifester par le retranchement excessif sur nos idées, sur
nos forces – mais ainsi nous glissons dans le pélagianisme –, ou par une attitude
d’ambition et de vanité. Ces mécanismes défensifs nous empêchent de comprendre vraiment
les autres et de nous ouvrir à un dialogue sincère avec eux. Mais l’Église, née de
la Pentecôte, reçoit en consigne le feu de l’Esprit Saint, qui ne remplit pas tant
la tête d’idées mais incendie le cœur ; elle est investie du vent de l’Esprit qui
ne transmet pas un pouvoir, mais habilite à un service d’amour, à un langage que chacun
est en mesure de comprendre.
Sur notre chemin de foi et de vie fraternelle, plus nous nous laisserons guider avec
humilité par l’Esprit du Seigneur, plus nous dépasserons les incompréhensions, les
divisions et les controverses et plus nous serons signes crédibles d’unité et de paix.
Avec cette joyeuse certitude, je vous salue tous avec affection, chers frères
et sœurs : le Patriarche Syro-Catholique, le Président de la Conférences Épiscopale ;
le Vicaire apostolique Monseigneur Pelâtre, les autres Évêques et Exarques, les prêtres
et les diacres, les personnes consacrées et les fidèles laïcs, appartenant aux différentes
communautés et aux différents rites de l’Église catholique. Je désire saluer avec
une fraternelle affection le Patriarche de Constantinople, Sa Sainteté Bartholomée
Ier, le Métropolite Syro-Orthodoxe, le Vicaire Patriarcal Arménien Apostolique et
les représentants des Communautés protestantes, qui ont voulu prier avec nous durant
cette célébration. Je leur exprime ma reconnaissance pour ce geste fraternel. J’envoie
une pensée affectueuse au Patriarche arménien apostolique Mesrob II, en l’assurant
de ma prière.
Frères et sœurs, tournons notre pensée vers la Vierge Marie, Mère de Dieu. Avec
elle qui a prié dans le cénacle avec les Apôtres dans l’attente de la Pentecôte, prions
le Seigneur pour qu’il envoie le Saint Esprit dans nos cœurs et nous rende témoins
de son Évangile dans le monde entier. Amen !
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