Irak : des progrès contre les djihadistes

(RV) Entretien- Des progrès significatifs sont observer dans le nord de l’Irak contre les djihadistes de l’Etat islamique. Les  peshmergas kurdes sont parvenus, grâce aux frappes américaines à récupérer quelques 100 km carré de territoire ; ils ont aussi ont rompu le siège du Mont Sinjar. C'est un soulagement pour les familles de Yazidis qui s’y étaient réfugiés, ou qui avaient refusé de quitter leur foyer. Ce vendredi matin,  70% de la zone du Mont Sinjar est libre, même si au sud, la zone est toujours sous contrôle de l'Etat islamique.

Pour Faraj Benoit Camurat, président de Fraternité en Irak, c’est évidemment une bonne nouvelle, mais après avoir appelé ses contacts sur place, il souligne que la joie reste mesurée parmi les Irakiens :

Ce matin, on s’est entretenu avec nos relais sur place et notamment avec ce chef de tribu yazidi dont je vous relatais l’appel au secours, il y a quelques jours. Il semblerait que les forces kurdes qui ont lancé une offensive avant-hier ait permis, hier, de faire la jonction avec les milices d’auto-défense yazidis et quelques soldats kurdes qui étaient restés sur le Mont Sinjar, dans la ville de Hardan, sur la face nord-est du Mont Sinjar. Mais le chef de tribu yazidi qui se trouve plutôt sur la face sud du Mont Sinjar, pour l’instant, n’avait pas reçu d’aide. Maintenant, le sujet, c’est que de l’aide puisse arriver par cette voie terrestre de manière urgente, que toutes les familles qui se trouvent sur le Mont Sinjar puissent, si elles le souhaitent, en partir ou si elles souhaitent ,rester, au moins vivre dans des conditions décentes : qu’elles puissent manger, qu’elles puissent se soigner et qu’elles puissent s’abriter contre les éléments et le froid de l’hiver qui risque d’arriver, maintenant, de manière beaucoup plus forte.

La responsable de la présidence kurde a déclaré que les familles yazidis présentes sur le Mont Sinjar pourraient être évacuées, peut-être même dès ce vendredi. Est-ce que pour vous, c’est la meilleure solution ? Et dans ce cas-là, où pourraient-elles aller, en sachant que la ville de Sinjar est toujours aux mains des djihadistes ?

Ce qui se passe, c’est que les yazidis considèrent le Mont Sinjar comme un lieu vraiment particulier pour eux. Au cours de leur histoire, à maintes reprises, le Mont Sinjar a été le lieu où ils se sont réfugiés pour échapper à l’extermination et aux violences. C’est aussi le lieu où dans la mythologie yazidi, l’arche de Noé se serait échouée. C’est un lieu qui abrite de nombreux mausolées, de nombreux lieux saints et donc, les yazidis y sont très attachés. C’est pourquoi je pense qu’un certain nombre d’entre eux vont probablement faire le choix de rester sur cette montagne. En revanche, il me semble évident que les personnes âgées, les femmes et les enfants vont souhaiter quitter le Mont Sinjar. Où est-ce qu’ils vont aller ? D’abord, le chemin qui a été ouvert aujourd’hui permet de relier le Mont Sinjar avec le poste frontière de Rabia à la frontière syro-irakienne. Et ensuite, il y a encore un certain chemin à faire mais visiblement, ça semble possible, pour amener ces réfugiés dans la région de Zakho, Nous parlions avec un des grands relais de Fraternité en Irak qui se trouve à Zakho et qui nous expliquait qu’il y avait, au sud de Zakho, un camp abritant des yazidis qui sont sous des tentes et où les conditions pour passer l’hiver vont tout de même être difficile. Ces réfugiés dans le camp auront accès, un peu comme tous les autres réfugiés en Irak, à de la nourriture, des médicaments et leur situation sera évidemment meilleure que sur le Mont Sinjar où ils étaient bloqués.

C’est évidemment une bonne nouvelle. Ce n’est malheureusement pas la fin des problèmes, surtout pour l’ensemble du nord de l’Irak. Est-ce que vous avez des échos sur les espoirs que cette victoire a suscités parmi les populations du nord de l’Irak ?

Les populations du nord de l’Irak sont maintenant devenues prudentes. Elles se réjouissent, bien sûr, de cette avancée, de cette victoire mais les lignes de front ont beaucoup changées, parfois rapidement. Je crois qu’on est quand même face à une avancée qui a l’air solide. Je crois qu’il y a lieu de se féliciter et de se réjouir. Le sujet, c’est que la plaine de Ninive reste occupée par l’État islamique. Or, il ne faut pas oublier que la Plaine de Ninive, c’est le berceau et le lieu où vivaient environ 130 milles chrétiens qui sont maintenant réfugiés dans les villes de Dohuk, d’Erbil, de Soulemania et dans un certain nombre de petits villages autour de Zakho et plus au nord-ouest d’Erbil. Donc, l’enjeu de la libération de la Plaine de Ninive est un sujet très important qui est attendu avec beaucoup d’impatience et on espère que cette avancée dans le Mont Sinjar soir l’hirondelle qui annonce le printemps de ce point de vue-là ! Je crois que d’un point de vue humanitaire, la prise de la plaine de Ninive est quelque chose qui fera beaucoup pour le moral des réfugiés parce que ça leur donnera une perspective de retour et puis, on l’espère que ça leur permettra aussi de rentrer chez eux dans un délai rapide.