2015-01-13 05:53:00

François, arrivé à Colombo, parle déjà de réconciliation


(RV) Colombo - François est arrivé au Sri Lanka. Dans son premier discours adressé aux autorités, le Pape a évoqué « les horreurs de la guerre civile » que le pays a traversées. « Dépasser l’héritage amer d’injustices, d’hostilités et de défiance laissé par le conflit n’est pas une tâche facile ». Le Pape a insisté sur le rôle « important » que « les personnes qui appartiennent à des traditions religieuses différentes » peuvent jouer dans le processus de réconciliation et de reconstruction, en cours dans le pays. « Le processus de guérison, a-t-il dit, demande d’inclure la recherche de la vérité, non pas dans le but d’ouvrir de vieilles blessures, mais plutôt comme moyen nécessaire pour promouvoir la justice, la guérison et l’unité ». François a évoqué l’importance de l’amélioration des infrastructures et de pourvoir aux besoins matériels, mais plus encore il faut, selon lui, « promouvoir la dignité humaine, le respect des droits de l’Homme et la pleine inclusion de tous les membres de la société ».

Couronne de fleurs et honneur militaire

Ce mardi matin, l’avion du Pape a atterri avec quelques minutes d’avance à 8h51 sur le tarmac de l’aéroport international de Colombo, la capitale du Sri Lanka. François est accompagné d’une délégation d’une trentaine de personnes, dont le cardinal Parolin, Secrétaire d’Etat, le cardinal Filoni, Préfet de la Congrégation pour l’Evangélisation des Peuples et du cardinal Sarah, en sa qualité de président émérite du Conseil pontifical Cor Unum.  A bord de l’avion se trouvent également quelques 80 journalistes venant du monde entier. Le nonce apostolique, Mgr Pierre Nguyen Van Tot, ainsi que le chef du protocole sont montés à bord de l’Airbus 330 d’Alitalia pour aller à la rencontre du Pape.

François est descendu par la porte antérieure de l’appareil, souriant mais le visage fatigué, deux enfants lui ont tendu des feuilles de Bétel, signe d'hospitalité, et une couronne de fleurs jaunes et blanches, aux couleurs du Saint-Siège. Le Pape l’a enfilée bien volontiers et posé sa main sur la tête des deux enfants.

Le nouveau président Maithripala Sirisena, élu la semaine dernière, est venu jusqu’aux pieds de l’escalier pour accueillir le Pape François. Le cardinal Malcolm Ranjith, le président de la Conférence épiscopale, l’a ensuite salué, précédant une série de personnalités srilankaises, dont de nombreuses femmes en « osariya », la tenue traditionnelle.

Danse traditionnelle

Des deux côtés du tapis rouge, des hommes en pantalons bleus bouffants, chapeaux pointus, ont entamé une danse traditionnelle, au son des tambours. Deux mille enfants venant de la périphérie de la capitale, dont des jeunes filles musulmanes voilées, ont agité de petits drapeaux aux couleurs du Saint-Siège, avec enthousiasme.

Au bout du tapis rouge, un éléphant et le chef d’Etat-major ont, côte-à-côte, salué le Pape, chacun à leur manière. Le militaire, solennel, a hurlé ses ordres aux soldats de l’armée de terre, de l’air et de la marine au garde-à-vous. Le pachyderme a lui relevé sa trompe, également aux ordres. Au Sri Lanka, l’éléphant est un animal portant fortune.

21 coups de canon ont été tirés, le plus important honneur militaire réservé aux personnes accueillies officiellement dans le pays. Tandis que le Pape s’installait sous une tente dressée pour l’occasion sur le tarmac, les hymnes du Vatican, puis du Sri Lanka se sont mis à retentir.

Au nom du chœur de jeunes adolescents qui s’apprêtait à chanter, une jeune fille a pris la parole en anglais : « Nous sommes heureux que vous soyez ici avec nous ». Leur chant est en anglais, en cinghalais et en tamoul.

Le président Sirisena a ensuite pris la parole, souhaitant la bienvenue au Pape. « Votre visite est significative pour moi qui viens d’être élu (…) une opportunité pour recueillir votre bénédiction alors que je prends mes fonctions ». Il a parlé de paix, de progrès et de la prospérité qu’il souhaite pour son peuple, évoquant la prochaine canonisation de Joseph Vaz. Le nouveau gouvernement a déclaré un jour férié ce mercredi à l’occasion de la venue du Pape.

 

François a ensuite pris la parole, en anglais. Voici son intervention en intégralité :

Monsieur le Président,

Honorables Autorités Gouvernementales,

Eminence, Excellences,

Chers amis,

Merci de votre accueil chaleureux. J’ai longtemps attendu cette visite au Sri Lanka et ces jours que nous allons passer ensemble. Le Sri Lanka est connu comme la Perle de l’Océan Indien en raison de ses beautés naturelles. Mais, bien plus important, cette île est connue pour le caractère chaleureux de son peuple et la riche diversité de ses traditions culturelles et religieuses.

Monsieur le Président, je vous présente mes meilleurs vœux pour vos nouvelles responsabilités. J’apprécie votre invitation à visiter le Sri Lanka, ainsi que vos paroles de bienvenue. Je salue les distingués membres du Gouvernement et les autorités civiles qui nous honorent de leur présence. Je suis particulièrement reconnaissant pour la présence des éminents représentants religieux qui ont un rôle si important dans la vie de ce pays. Et, bien sûr, je désire exprimer mon estime aux fidèles, aux membres de la chorale, et aussi aux nombreuses personnes qui se sont dépensées pour rendre possible cette visite. Je vous remercie tous, du fond du cœur, pour votre amabilité et votre hospitalité.

Ma visite au Sri Lanka est, en premier lieu, pastorale. En tant que pasteur universel de l’Église catholique, je suis venu pour rencontrer et encourager les catholiques de cette île, et aussi pour prier avec eux. Un point central de cette visite sera la canonisation du bienheureux Joseph Vaz, dont l’exemple de charité chrétienne et de respect pour toute personne, sans distinction d’ethnie ou de religion, continue, aujourd’hui encore, de nous inspirer et de nous enseigner. Mais ma visite veut aussi exprimer l’amour et la sollicitude de l’Église pour tous les Sri-lankais, et confirmer le désir de la communauté catholique de participer activement à la vie de cette société.

C’est une continuelle tragédie de notre monde que beaucoup de communautés soient en guerre entre elles. L’incapacité à réconcilier les diversités et les désaccords, qu’ils soient anciens ou nouveaux, à fait apparaître des tensions ethniques et religieuses, souvent accompagnées d’accès de violence. Pendant de nombreuses années, le Sri Lanka a connu les horreurs de la guerre civile, et à présent il cherche à consolider la paix et à soigner les blessures de ces années. Dépasser l’héritage amer d’injustices, d’hostilités et de défiance laissé par le conflit n’est pas une tâche facile. Cela ne peut être réalisé qu’en faisant vaincre le mal par le bien (Cf. Rm 12, 21) et en cultivant les vertus qui promeuvent la réconciliation, la solidarité et la paix. De plus, le processus de guérison demande d’inclure la recherche de la vérité, non pas dans le but d’ouvrir de vieilles blessures, mais plutôt comme moyen nécessaire pour promouvoir la justice, la guérison et l’unité.

Chers amis, je suis convaincu que les personnes qui appartiennent à des traditions religieuses différentes ont un rôle essentiel à jouer dans le processus délicat de réconciliation et de reconstruction qui est en cours dans ce pays. Pour que ce processus ait lieu, il faut que tous les membres de la société travaillent ensemble ; tous doivent avoir la parole. Tous doivent être libres d’exprimer leurs propres préoccupations, leurs besoins, leurs aspirations et leurs peurs. Mais, surtout, ils doivent être prêts à s’accepter mutuellement, à respecter les diversités légitimes et apprendre à vivre comme une unique famille. Chaque fois que les personnes s’écoutent humblement et de manière ouverte, les valeurs et les aspirations communes apparaîtront toujours plus visiblement. La diversité ne sera plus vue comme une menace, mais comme une source d’enrichissement. La route vers la justice, la réconciliation et l’harmonie sociale sera vue encore plus clairement.

En ce sens, la grande œuvre de reconstruction doit inclure l’amélioration des infrastructures et pourvoir aux besoins matériels, mais aussi, et c’est encore plus important, elle doit promouvoir la dignité humaine, le respect des droits de l’homme et la pleine inclusion de tous les membres de la société. Je forme le vœu que les responsables politiques, religieux et culturels du Sri Lanka, prenant la mesure du bien et de la guérison qui résulteront de chacune de leurs paroles et de leurs actions, apportent une contribution durable au progrès matériel et spirituel du peuple du Sri Lanka.

Monsieur le Président, chers amis, je vous remercie encore une fois de votre accueil. Puissent ces jours que nous passerons ensemble être des jours d’amitié, de dialogue, et de solidarité. J’invoque les abondantes bénédictions de Dieu sur le Sri Lanka, la Perle de l’Océan Indien, et je prie pour que sa beauté resplendisse pleinement en faveur de la prospérité et de la paix de tous ses habitants.








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