2015-02-26 17:42:00

Pierre de Lauzun, un « regard chrétien » sur la finance


(RV) Pierre de Lauzun est le lauréat 2015 du Prix international « Economie et société » de Centesimus Annus - Pro Pontifice, la fondation vaticane créée par Jean-Paul II en 1993 dans le but de promouvoir la diffusion de la doctrine sociale de l’Eglise. Elle a récompensé l'économiste français pour son ouvrage Finance. un regard chrétien. De la banque médiévale à la mondialisation financière (Embrasure, 2012).

« Ce n’est pas un érudit enfermé dans une bibliothèque, mais un homme qui approfondit depuis des années son expérience professionnelle avec une riche réflexion politique, culturelle et religieuse ». C’est en ces termes que le jury du prix a présenté jeudi l’économiste Pierre de Lauzun. A la lumière de la réflexion des Saintes Ecritures et des Pères de l’Eglise sur les problèmes économiques de leur temps, ainsi qu'à la lumière de la doctrine sociale de l’Église des papes modernes, il détaille dans son ouvrage les problèmes moraux de la finance contemporaine.

Parmi ces problèmes, ceux inhérents à la qualité de la formation des prix, à l’importance d’une vision à long terme, à la réalité de la valeur ajoutée, à la domination des risques collectifs ou encore à l’endettement.

Pour l’économiste, des règles imposées au marché par l’autorité politique sont nécessaires, car la politique a le devoir d’assurer le bien commun. Pierre de Lauzun utilise une image sportive pour se faire comprendre : « le marché a besoin de règles du jeu, et ce n’est pas durant un match que l’on peut les établir ; elles doivent être élaborées avant, en accord avec la logique du jeu ». Mais dans le même temps, chaque système de règles a besoin de pouvoir compter sur la moralité des agents humains. « Sur le long terme, écrit encore Pierre de Lauzun, la moralité permet une plus grande liberté ».

Les valeurs chrétiennes au cœur du monde économico-financier

La cérémonie de remise des prix aura lieu le 26 mai prochain à Rome, au palais de la Chancellerie, sous la présidence du cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin. Elle aura lieu lors de la conférence internationale de la fondation.

Durant les deux dernières années qui la séparent du discours que le Pape lui a adressé le 25 mai 2013, la fondation a continué jusqu’à ce jour à se référer aux paroles de François : « il est essentiel de réattribuer au terme “solidarité” – vu d’un mauvais œil dans le monde de l’économie, comme si c’était un vilain mot – toute la dignité sociale qu’il mérite ».

Le Pape François a consacré une large partie de son exhortation apostolique Evangelii Gaudium, largement citée jeudi matin : « De même que le commandement de “ne pas tuer” pose une limite claire pour assurer la valeur de la vie humaine, aujourd’hui, nous devons dire “non à une économie de l’exclusion et de la disparité sociale”. Une telle économie tue. Il n’est pas possible que le fait qu’une personne âgée réduite à vivre dans la rue meure de froid ne soit pas une nouvelle, tandis que la baisse de deux points en bourse en soit une. Voilà l’exclusion. »

Ces paroles doivent être rappelées dans la vie de tous les jours, explique Mgr Giuseppe Antonio Scotti, membre du jury, qui s’est réjoui par exemple des paroles du président de la République italienne à peine élu, Sergio Mattarella. « La condition principale pour rapprocher les Italiens aux institutions est celle d’entendre la politique comme un service au bien commun, patrimoine de tout un chacun ». Mais le prélat regrette que ces paroles n'aient reçu qu'un faible écho dans la presse italienne.  

La question plus large abordée par la fondation est de comprendre comment peuvent se mettre ensemble les principes de la doctrine sociale de l’Église avec les exigences des politiques entrepreneuriales, de l’économie en générale. Centesimus Annus ne pense pas qu’il s’agit d’une « éternelle rencontre manquée entre une belle utopie et un progrès imperméable à des règles éthiques ». Son président, au contraire, entend « mordre la chair » de la question. Autrement dit, porter les valeurs chrétiennes au cœur du monde économico-financier.








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