2015-04-17 16:49:00

Drame de l'immigration : vers une « barbarisation » de la religion


(RV) Entretien – L’Église est stupéfaite après la mort de douze migrants chrétiens, jetés en mer durant la traversée de la mer Méditerranée, de la Libye vers l’Italie. Mgr Nunzio Galantino, le secrétaire général de la CEI, la conférence épiscopale italienne, interrogé par Alessandro Guarasci, de la rédaction italienne de Radio Vatican, évoque une « barbarisation ».

« Il fallait s’y attendre. Certains discours jusqu’ici restaient sur le plan idéologique. Une idéologie qui alimentait certains comportements encadrés par des éléments plus ou moins structurés, des groupes, des associations, des clans. Désormais ce genre de discours contrasté, de revendication, malheureusement basé sur la religion mais qui n’a en réalité rien à voir avec elle, est appliqué au niveau individuel. Cela représente selon moi un pas de plus vers la barbarisation, l’instrumentalisation de la religion.

Cela signifie-t-il que l’extrémisme de l’État islamique et, par exemple, de Boko Haram au Nigéria, se fait une place toujours plus grande ?

Quand des personnes qui vivent la même situation difficile, comme les traversées en mer, instrumentalisent l’expérience religieuse, le credo religieux, pour faire prévaloir sa propre pensée, cela veut dire que certains raisonnements ont été intériorisés.

Êtes-vous déçu de la façon dont réagit le Vieux continent en ce moment ?

Dire “déçu” selon moi, c’est trop peu, car il est évident qu’on ne veut pas réfléchir sérieusement à cette situation. Il est clair que l’on ne peut pas affronter ce problème, ce drame, avec les instruments de toujours. Il faut d'autres façons de penser, d’autres façons d’agir, de se comprendre. Ici, les alternatives sont soit écarter les bras, soit partir en guerre : mais est-ce possible que des États qui ont des énergies intellectuelles et organisatrices extraordinaires ne soient pas en mesure de penser à des interventions qui ne soient pas armées, mais d’accueil ? J’ai vraiment l’impression qu’il s’agit seulement d'une manière élégante de se laver les mains face à un drame qui deviendra toujours plus insupportable pour l’Italie.

Le rôle modeste des États-Unis dans cette situation, surtout en Afrique du Nord, vous surprend ?

J’attends que les États-Unis, l’Europe et les autres disent au moins une parole. Au moins une ! D’autocritique sur ce qu’ils ont fait dans le passé. Si nous sommes sérieux, nous devons dire aussi qu’une grande partie de cette situation a été favorisée, sinon créée, par certains types d’interventions imprudents, des interventions derrières lesquelles on découvre toujours plus qu’il n’y avait que des intérêts : pas l’envie d’exporter des valeurs, la démocratie ! »








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