2015-11-30 21:03:00

Conférence de presse : le Pape François dénonce «l'idolâtrie de l'argent»


(RV) Dans l'avion de retour de sa tournée en Afrique, le Pape François s'est adonné, comme c'est la tradition, à une heure de dialogue avec les journalistes. Il est revenu sur les grands sujets d'actualité du moment : la COP 21, les fondamentalismes religieux, les affaires de corruption, ou encore sur ses voyages apostoliques.

COP 21

Alors que s'est ouverte à Paris la COP 21, la conférence mondiale sur le climat, le Pape François a exprimé son inquiétude. «Je n'en suis pas sûr (du résultat de la COP 21), mais ce que je peux dire, c'est que c'est maintenant ou jamais», a déclaré le Souverain pontife.

Depuis la conférence de Kyoto en 1997, «peu a été accompli» et «chaque année, les problèmes sont plus graves», alors qu'il peut sembler, «pour employer une parole forte, que nous soyons au bord du suicide», a insisté le pontife argentin. Cependant, «la quasi-totalité de ceux qui sont à Paris veulent faire quelque chose. J'ai confiance qu'ils le feront, ils ont de la bonne volonté et je prie pour cela», a-t-il dit.

Des propos en continuité avec ceux tenus dans son encyclique Laudato Si', parue en juin dernier. Au fil de nombreuses interventions cette année, il a réclamé à plusieurs reprises que la COP 21 aboutisse à un accord contraignant dans lequel les pays les plus riches aideront financièrement et techniquement les plus pauvres à accomplir cette révolution écologique. Le Saint-Siège a été représenté à l'ouverture de la COP 21 par le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d'État du Saint-Siège, qui avait quitté la délégation pontificale en Afrique pour rejoindre Paris.

PAUVRETÉ

Le Pape François s'est dit bouleversé par la pauvreté de nombreuses personnes rencontrées en Afrique, et il a une nouvelle fois dénoncé les ravages de l'idolâtrie de l'argent. «Hier je suis allé à l’hôpital pédiatrique, l’unique de Bangui et du pays. En thérapie intensive, ils n’ont pas d’oxygène, il y a tellement d’enfants en malnutrition. La docteur m’a dit : la plupart d’entre eux va mourir, parce qu’ils ont la malaria et sont mal nourris.»

«L’idôlatrie, c’est quand un homme ou une femme perd sa carte d’identité, c’est-à-dire le fait d’être enfant de Dieu, et préfère se chercher un Dieu à sa mesure, s'est-il attristé. Si l’humanité ne change pas, la misère, les tragédies, les guerres, les enfants qui meurent de faim, l’injustice, tout cela continuera.»

AFRIQUE

Le Pape a reconnu qu’il serait difficile pour lui de revenir en Afrique. «Moi, je suis vieux, les voyages sont pesants !», a-t-il lancé. Mais il garde de grands souvenirs de son premier voyage sur le continent africain. «Cette foule, cette joie, cette capacité de faire la fête, même avec le ventre vide. Chaque pays a son identité : le Kenya est un peu plus moderne et développé. L’Ouganda a l’identité de ses martyrs ; le peuple ougandais, que ce soit les catholiques ou les anglicans, venère ses martyrs. La République centrafricaine a une volonté de paix, de réconciliation, (…) Aujourd’hui je suis allé à la mosquée, j’ai prié à la mosquée, l’imam est monté sur la papamobile pour faire un petit tour parmi les réfugiés.» 

«Maintenant, ils vont faire les élections, ils ont choisi une présidente de transition : il n’y a aucune haine», a insisté le Saint-Père. Il a toutefois évoqué rapidement l'action des milices anti-balaka, en évoquant «un petit groupe très violent, chrétien, je crois, ou qui se dit chrétien.»

Le Pape a aussi évoqué plus globalement la pauvreté de l'Afrique, «exploitée par les grandes puissances», et a refusé toute argumentation sur la liceité ou non du port du préservatif pour lutter contre le Sida : «Je n’aime pas descendre dans des réflexions casuistiques quand les gens meurent de faim ou du manque d’eau», a lancé le Pape François.

VATILEAKS

Interpellé sur le procès au Vatican de cinq personnes, dont deux journalistes, poursuivis pour les fuites de documents confidentiels dans l'affaire dite "Vatileaks 2", François a réfuté toute idée d'atteinte à la liberté de la presse. « La dénonciation des injustices et de la corruption est un beau travail. La presse professionnelle doit tout dire, mais sans tomber dans les trois péchés les plus communs : la désinformation, c’est-à-dire dire seulement la moitié de la vérité, la calomnie, quand la presse non professionnelle salit les personnes, et la diffamation, qui revient à dire des choses qui abiment la réputation d’une personne. Ce sont les trois défauts qui portent atteinte au professionnalisme de la presse. Un vrai journaliste, s’il se trompe, doit s’excuser.»

Il a aussi précisé qu’il aurait voulu que le procès puisse se tenir avant le Jubilé, mais qu’il fallait laisser le temps aux prévenus de préparer leur défense.

Concernant la corruption au Vatican, François a rappelé que «le cardinal Ratzinger avait parlé de la "saleté de l’Église"», notamment lors du Vendredi Saint 2005, une semaine avant la mort de Jean-Paul II. «Nous l’avons élu pour cette liberté de dire les choses», a-t-il affirmé, faisant allusion au conclave de 2005. «Je remercie Dieu qu’il n’y ait plus Lucrèce Borgia. Mais nous devons continuer, avec les cardinaux et les commissions, cette œuvre de nettoyage.»

FONDAMENTALISMES

Interrogé sur les attentats récents qui ont marqué l'actualité, notamment à Paris, le Pape a réfuté toute idée d'un lien consubstantiel entre l'islam et la violence. «Nous sommes tous enfants de Dieu, nous avons le même Père. Il y a des fondamentalistes dans toutes les religions. Nous les catholiques, nous en avons quelques-uns, beaucoup, qui croient avoir la vérité absolue et agissent en salissant les autres avec la calomnie, la diffamation, et font du mal. Je le dis parce que c’est mon Église (…). Le fondamentalisme qui finit en tragédie est une chose mauvaise, mais advient dans toutes les religions ».

Il a par ailleurs précisé que l’histoire du christianisme n’était pas exempte de violence. «Le sac de Rome (par les troupes de Charles Quint en 1527, ndlr) , ce n’est pas les musulmans qui l’ont fait.», a-t-il lancé.

MEXIQUE

François a par ailleurs confirmé que son prochain voyage serait pour le Mexique, à une date encore non fixée définitivement. Il ira visiter le sanctuaire de Guadalupe, à Mexico, mais il compte aussi se rendre dans trois ou quatre villes qu’aucun Pape n’a jamais visité. Il ira probablement au Chiapas, à Morelia, et à Ciudad Juarez, sur la frontière avec les États-Unis. Par ailleurs, il a annoncé qu’il était invité à revenir à Aparecida au Brésil en 2017, ville déjà visitée en marge des JMJ de 2013, et que d’autres pays latino-américains pourraient être visités, mais que rien de plus précis n’est programmé pour le moment.

(CV avec AFP)

 








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