2016-02-23 18:47:00

Le chef de l'Église gréco-catholique d'Ukraine veut «cheminer» avec les orthodoxes


(RV) «Nous voulons cheminer ensemble avec les orthodoxes, construire non seulement la paix, mais nous voulons l’unité entre les Églises». Ainsi s’est exprimé l’archevêque majeur de Kiev, Sviatoslav Shevchuk, chef de l’Église gréco-catholique d’Ukraine, durant une rencontre avec des journalistes ce mardi 23 février 2016 à Rome. Dans un dialogue détendu et franc, durant lequel il a répondu à différentes questions et a annoncé qu’il sera bientôt reçu en audience par le Pape François, l’évêque est revenu sur la rencontre et la Déclaration conjointe du Pape François et du Patriarche Cyrille 1er à Cuba, expliquant la perplexité et les polémiques qui s’en sont suivies en Ukraine, mais soulignant surtout qu’il s’agit d’un évènement positif, un point de départ et non d’arrivée.

«"Finalement !" C’est cette expression que j’ai répétée, en voyant l’accolade entre le Pape et le Patriarche». L’archevêque Sviatoslav Shevchuk a ouvert ainsi sa longue conversation avec les journalistes, revenant sur cette rencontre historique, mais qui a suscité une vive inquiétude en Ukraine : «Je pense que cette accolade est vraiment une chose sacrée», une étape fondamentale dans «le chemin œcuménique de l’Église» a lancé le chef de l’Église gréco-catholique d’Ukraine.

«L’Esprit Saint a ouvert des horizons inconnus, nous faisant sortir des limites humaines.» Un évènement donc positif, comme l’a été la Déclaration conjointe, même si, dans un texte aussi long, il est toujours difficile d’être clair, a-t-il reconnu.

L’évêque n’a pas caché la perplexité et les douleurs qu’elle a provoquées en Ukraine. Il reconnait toutefois comme positif l’affirmation du «droit à exister» reconnu aux «communautés ecclésiales» et «le droit d’assister nos fidèles partout», ce qui jusqu’à présent n’était pas permis, mais il a répété : «nous ne devons pas demander à quelqu’un le droit d’exister, seul Dieu l’établit», et l’usage générique du terme de «communautés ecclésiales» sans citer explicitement l’Église gréco-catholique d’Ukraine rend cette texte un peu confus : «Dans la terminologie œcuménique moderne, ce terme est utilisé pour les communautés chrétiennes qui n’ont pas conservé la plénitude de la succession apostolique (ndlr : pour l’essentiel, les communautés protestantes). Alors que, nous sommes partie intégrante de la communion catholique», a-t-il souligné.

L’évêque a par ailleurs souligné que la façon de concevoir et de présenter la guerre en Ukraine, dans la Déclaration conjointe, a suscité des polémiques. «Maintenant, on n’en parle plus tellement, et pourtant elle existe et c’est un drame, pour 45 millions de personnes. Chaque jour, il y a des morts, des blessés, des entrées de soldats russes et d’armes lourdes. En effet, il ne s’agit pas d’un conflit civil mais d’une agression étrangère, et cela n’a pas émergé dans la Déclaration», a regretté Sviatoslav Shevchuk.

Mais il a ensuite ajouté que «le Saint-Père a apporté d'importantes clarifications, car a il a rappelé qu’il avait rencontré les deux présidents, et il se référait autant au président Poutine qu’au président ukrainien Porochenko. Et ceci est vraiment beau et rassurant, car il a dit ainsi : "J’ai parlé à tous en disant : mais faites-la finir ! Faites la paix !"»

Le Pape comprend la souffrance des Ukrainiens

À ceux qui lui font remarquer que le peuple ukrainien est resté blessé par la Déclaration, l’archevêque a expliqué : «Je comprend ces sentiments de mon peuple, c’est pour cela que je m’en suis fait porte-voix, afin que nous soyons pas simplement entre nous, à nous complaindre. Le Saint-Père doit connaître ces sentiments, il a même dit qu’il respecte ces sentiments, et que le peuple ukrainien souffre vraiment, il souffre de la guerre, qui peut-être empêche de comprendre ce geste prophétique.»

«Mais nous, les pasteurs, a-t-il ajouté, nous avons la responsabilité de faire comprendre et de nous faire comprendre. Si les pas prophétiques accomplis par le Pape sont l’œuvre de l’Esprit Saint, ils porteront leurs fruits». L’archevêque gréco-catholique appelle à un dialogue dans la vérité, avec un ton calme et libre des conditionnements géopolitiques, et avec prudence, face au péril de l’instrumentalisation de la religion.

«Les chrétiens peuvent commencer un dialogue, s’écouter, se pardonner, faire la paix, faire un chemin vers l’unité pleine et visible, seulement quand ils seront libres de la géopolitique, de la soumission à un pouvoir temporel, libérés de la folie des puissants de ce monde», a-t-il insisté.

«Ce qui sert à la communion est le chemin, a rappelé l’archevêque majeur de Kiev : en Ukraine, le niveau de collaboration est plus avancé que ce que l’on croit. Donc on peut partir du travail dans la cadre du Conseil pan-ukrainien des Églises, mais il faut toujours garder à l’esprit quelle est la richesse contenue dans la rencontre, et ne plus la craindre».

(CV)








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