2016-03-05 15:13:00

Méditation pour le quatrième dimanche de Carême


Le Père jésuite Antoine Kerhuel nous introduit à la méditation avec les lectures du quatrième dimanche de Carême

(RV) En ce quatrième dimanche de Carême, les textes de la liturgie invitent à la joie. Cela peut nous surprendre : la démarche de Carême nous ouvre à une conversion qui est chemin de joie. Le livre de Josué nous raconte que le peuple d’Israël, après sa longue marche à travers le désert, arrive enfin dans la terre de Canaan : il n’a plus besoin de recevoir la manne, car il peut manger les produits de la terre où il est entré … une vie nouvelle commence pour lui ! Saint Paul, dans la seconde lettre aux Corinthiens, s’exclame : « Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né ». Et enfin, l’évangile de ce dimanche invite à éprouver les effets de la miséricorde dans les relations humaines et à entrer pleinement dans la joie du pardon.

Arrêtons-nous sur la parabole rapportée par l’évangéliste Luc. Jésus se trouve face à des gens moralement recommandables et édifiants par leur conduite (les pharisiens et les scribes), et ceux-ci s’indignent de le voir partager la table de personnes de mauvaise vie. Jésus raconte alors une histoire, que nous connaissons bien. Un homme a deux fils. Le plus jeune lui demande sa part d’héritage pour vivre comme il le souhaite (en partant loin de sa famille). Le plus âgé reste auprès de son père, partageant avec lui le poids du quotidien. Après avoir dépensé son argent dans une vie de désordre, le plus jeune fils se rend compte qu’il n’a plus de ressources (d’autant plus qu’une famine est arrivée) ; il se met alors à réfléchir en lui-même, et il prend la décision de revenir vers son père pour se mettre à son service, non plus comme l’un de ses enfants mais comme l’un de ses ouvriers. Lorsque son père le voit revenir, il lui réserve un accueil chaleureux et organise une grande fête. Lorsqu’il apprend la nouvelle, le fils aîné – celui qui est resté fidèlement auprès de son père au fil des jours – se fâche : pas question, pour lui, de participer à un tel banquet ! Et il faut que le père aille le trouver pour lui dire : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait bien festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. » L’invitation à la joie est adressée à tous ! Les pharisiens et les scribes qui entendent Jésus raconter cette histoire, comprennent-ils le message ? Et nous-mêmes qui entendons cet évangile proclamé dans nos églises, entendons-nous cet appel ? Le Seigneur invite à entrer, profondément, dans l’expérience de la miséricorde … et donc à laisser cette expérience renouveler nos relations avec nos proches, avec nos amis, avec nos collègues de travail, avec ceux que nous ne connaissons pas et croisons au marché ou dans la rue, avec ceux qui vivent au loin !

La conversion à laquelle la démarche du Carême conduit n’est donc pas une invitation à entrer dans un moralisme ombrageux et défiant à l’égard d’autrui. Cette conversion est orientée vers la célébration, le banquet et la fête. Jésus surprend ses auditeurs et sans doute nous déconcerte-t-il nous aussi. Il n’obéit pas aux représentations habituelles de ce que devrait être une société bien ordonnée. Jésus déplace l’ordre des choses, car il invite à accepter ce que nous n’osons peut-être pas espérer (ce que nous n’osions peut-être plus espérer). C’est ici que nous pouvons revenir à l’exclamation de Paul, dans la seconde lettre aux Corinthiens : « Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. Tout cela vient de Dieu : il nous a réconciliés avec lui par le Christ, et il nous a donné pour ministère de travailler à cette réconciliation ». Voilà qui bouleverse nos vies !

Naïveté ? angélisme ? générosité ? C’est ce que pensent certains esprits chagrins qui se veulent réalistes. N’oublions pas que ce Jésus qui nous tourne vers la joie, est celui-là même qui, de manière délibérée, acceptera d’entrer dans la passion, vivra l’expérience de la croix et recevra de son Père la plénitude de la vie. Ce Jésus qui nous entraîne vers la vie est celui dont, dans quelques jours, nous célébrerons la mort et la résurrection. Jésus nous fait traverser toutes les formes de mort qui ne cessent de menacer notre existence. Avec lui est la joie, la vraie joie. (SK)








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