2016-05-04 16:29:00

Père Federico Lombardi, SJ : « La mort de Papa Wemba nous touche profondément »


(RV) Au moment où la République démocratique du Congo rendait le dernier hommage mercredi 4 mai 2016 à leur star de musique, Papa Wemba, lors d’une messe en la cathédrale de Kinshasa, avant son inhumation l’après-midi en périphérie de la capitale, le Vatican, à travers son Porte-parole, a voulu aussi se souvenir de cet homme et chrétien qui a rendu service à son Eglise.

En effet, la mort de Jules Shungu Wembadio, alias Papa Wemba, a été ressenti même au Vatican où le Porte-parole du Saint-Siège, le Père Federico Lombardi, qui a eu à le rencontrer à Rome, s’est dit bouleversé et attristé par sa mort.

Le Porte-parole du Saint-Siège a indiqué qu’il avait connu et rencontré Papa Wemba dans le contexte du Synode des évêques sur l’Afrique, qui portait sur la Justice, la Paix et la Réconciliation. A cette occasion, lui, comme Directeur général de Radio Vatican, a eu l’initiative, avec les programmes africains de Radio Vatican, de promouvoir et d’utiliser la musique africaine pour diffuser des messages importants des évêques pour l’Afrique et pour l’Eglise africaine. « Nous avons pensé, a-t-il affirmé,  que pour faire passer le message des évêques réunis en Synode au peuple africain, il ne suffisait pas d’écrire des beaux documents, avec des longues discussions et explications de la doctrine de l’Eglise. Nous avons jugé nécessaire d’utiliser un autre moyen efficace pour faire passer, dans le cœur des africains, le message fondamental de la Justice, de la Paix et de la Réconciliation. Et nous avons trouvé qu’un tel message pouvait passer à travers la musique, à travers les chants, qui constitue une dimension importante des cultures africaines. C’est dans ce cadre que nous avons appelé quelques artistes africains, en particulier Papa Wemba, pour nous aider.

« Un homme disponible »

Papa Wemba s’est montré très disponible pour nous aider ».

Le Père Lombardi a précisé qu’avec Papa Wemba, nous avons réalisé trois initiatives importantes. « Il a tout d’abord participé à un grand concert que nous avons organisé à Rome pendant le Synode sur l’Afrique, avec des milliers de spectateurs dans un grand auditorium. C’était un concert de musique africaine, dont le but était exactement de faire passer, à travers les chansons, le message de Justice, de Paix et de Réconciliation. Pratiquement tous les évêques participants au synode était présents. C’était une initiative très formidable.

Ensuite, pour continuer ce service, nous avons demandé à Papa Wemba, ainsi qu’à d’autres musiciens que nous avions invités de produire un CD, un album avec des chansons qu’ils avaient composés justement pour faire passer le message de la Justice, de la Paix et de la Réconciliation. C’étaient des chansons originales inspirées de la trilogie « Justice-Paix-Réconciliation ». Nous avons multiplier ce CD et l’avons envoyé à tous les diocèses d’Afrique après le Synode.

Nous avons enfin organisé, à Cotonou, au Bénin, un concert dans un stade ouvert, le jour de l’arrivée du Pape (Benoit XVI), pour le voyage durant lequel le Pape a promulgué l’exhortation post-synodale (Africae Munus).

C’est donc dans le cadre de ce Synode des évêques sur « Justice, Paix et Réconciliation » que nous avons réalisé ces trois initiatives importantes à Rome et en Afrique avec lui. Il était très disponible, très amical. Je garde des bons souvenirs de rencontres avec lui, de sa disponibilité. Il était très heureux de pouvoir contribuer dans un projet visant le bien du peuple. »

Le Porte-parole du Saint-Siège a en outre relevé l’opportunité qui avait été donnée à Papa Wemba et son épouse de rencontrer le Pape Benoît XVI. « C’était un jour très beau, c’était magnifique. Il en était très content et il n’a pas manqué d’exprimer sa gratitude. Mais C’était aussi pour nous un moyen de lui exprimer notre gratitude pour ce qu’il avait fait pour nous, avec nous et pour l’Eglise », a affirmé le Père Lombardi avant d’ajouter qu’il restait très reconnaissant envers Papa Wemba et gardait de lui un bon souvenir d’amitié. « Et naturellement la nouvelle de sa mort nous touche profondément. Mais nous sommes contents d’avoir réalisé avec lui une belle initiative pour l’Afrique, car les chansons qu’il a réalisées pour Radio Vatican et donc pour l’Eglise, portent un message qui durera continuellement. Chanter pour la Paix, la Justice et la réconciliation, c’est chanter pour un monde meilleur, un monde réconcilié dans lequel on peut vivre dans la joie en Afrique en particulier mais aussi dans tout l’univers », a dit en substance le Père Lombardi.

Un notre témoignage c’est celui d’un opérateur économique congolais, Gabriel Shabani, propriétaire et président de beaucoup de sociétés, dont la Télévision CongoWeb : « J’ai connu Papa Wemba tout jeune, à 14 ans. J’étais encore à l’école secondaire. Grand ami de mon père, Papa Wemba venait chez nous, à la maison. Je me rendais moi-même chez lui à sa maison. Après mes études secondaires, je me suis rendu en Allemagne pour des études supérieures. Là aussi, j’ai rencontré Papa Wemba, et nous avons partagé des bons moments ensemble.

« Un Papa »

De retour au Congo, j’ai beaucoup travaillé avec lui, moi en tant que producteur. Je peux donc dire que j’ai connu Papa Wemba d’abord en tant que père, et ensuite en tant collaborateur du point de vue professionnel ».

A la question de savoir les qualités qu’il avait remarquées chez Papa Wemba, Gabriel Shabani n’a pas été avare de paroles : « C’était vraiment un Papa. Mais, je crois que les artistes vivent deux vies. J’ai noté que Papa Wemba vivait une vie d’artiste, mais à la maison, il était vraiment un Papa. La preuve en est que ses enfants ont reçu une très bonne éducation. Je dirais donc que Papa Wemba était un artiste, mais aussi un Parent, un papa. Et puis il s’était converti au Christ, et il était de plus en plus proche de Dieu. J’ai aussi eu la joie de l’accompagner à Rome, à l’occasion du deuxième Synode des évêques pour l’Afrique, pour une production sur le thème du Synode. A Rome aussi, j’ai partagé des bons moments avec lui. Nous étions très proches, et c’était un temps où j’ai beaucoup parlé avec lui ».M. Shabani, à l’exemple de Papa Wemba, conseille aux autres artistes-musiciens de savoir faire la part des choses. On peut bien vivre sa vie d’artiste, soutient-il, mais il faut aussi savoir être parent, être humain. « Lorsqu’on est un grand artiste, une super star, les medias parlent de vous, les foules vous suivent, il y a risque de s’affoler et de se distraire. Mais je pense qu’au-delà de tout cela, il faut garder ses deux pieds sur terre. Il faut être conscient et savoir vivre sa vie en famille. J’ai beaucoup appris de Papa Wemba l’esprit de vie en Famille. Et je pense que ce que nous tous, en particulier les jeunes artistes, pouvons retenir de Papa Wemba, c’est de mettre la vie de famille au centre de notre vie, au-delà de nos activités », a conseillé Gabriel Shabani.

« Très ouvert »

Reddy Amisi est un artiste-musicien qui a passé plus de vingt ans à coté de Papa Wemba. En livrant son témoignage, il a fait savoir qu’il avait une vingtaine d’années quand l’a rencontré Papa Wemba et qu’il a beaucoup appris de lui. « Nous avons fait le tour du monde. Je conserve de lui le souvenir d’un homme non conflictuel, un homme de cœur, un homme d’une grande ouverture d’esprit par rapport aux jeunes. Il est l’un des rares de sa génération à avoir attiré beaucoup de jeunes au tour de lui. J’ai beaucoup de respect envers lui. Il a apporté la musique du Congo en dehors des frontières nationales : il l’a amené au Japon, aux Etats-Unis, et un peu partout. C’était un homme très ouvert. Il a fait beaucoup de featuring avec beaucoup de grands musiciens africains, notamment Youssou N’Dour, Salif Keita. Il a joué avec Peter Gabriel et bien d’autres ».

J’aimais aussi beaucoup sa philosophie qui consistait au respect des parents, des ainés, à aller à l’école, a dit Reddy Amisi. « Il nous apprenait aussi la propreté : ‘être bien coiffé, bien habillé, bien parfumé’ (…) Papa Wemba nous apprenait à soigner l’image. Aujourd’hui, il suffit de bien regarder la société congolaise, même la classe politique, on remarquera qu’elle s’est beaucoup inspirée de l’accoutrement pour lequel Papa Wemba militait. Ce n’était pas seulement l’accoutrement, mais il nous apprenait à soigner l’image, pour être présentable partout où l’on pouvait passer. C’est un homme qui restera gravé dans ma mémoire, et ses chansons resteront éternelles ».

(JPB)








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