(RV) Le choix des Britanniques va marquer un tournant dans l’histoire. Après une campagne violente, ils ont voté pour sortir de l'Union européenne lors du référendum organisé jeudi 23 juin 2016. Selon des chiffres officiels publiés ce vendredi en début de matinée, 51,9 % des électeurs ont voté pour quitter l'UE contre 48,1%. Une majorité d'environ un million de voix. La participation a été importante, 72 %.
Une unité nationale mise à mal
Les résultats émanant au compte-goutte des 382 centres de vote montrent un pays
très divisé. Tous les comtés d'Écosse ont voté pour le Oui et déjà Alex Salmond, l'ancien Premier
ministre à Edimbourg appelle à l'organisation d'un nouveau referendum sur l'Indépendance. Martin McGuinness,
du Sin Fein, le numéro2 du gouvernement de l'Irlande du Nord, qui a voté pour le maintien,
demande un referendum sur l'unification de l'île. Globalement, on peut dire que le
Grand Londres et plusieurs grandes villes, sont pour l'Europe tandis que le reste
de l'Angleterre a dit Non. Le pays de Galles a également voté pour quitter l'Union
européenne.
Les avertissements sur les risques pour l'économie n'ont pas été entendus, mais ce
vote est aussi interprété comme un vote contre l'Establishment et les élites.
David Cameron restera ?
Un des chefs de file du Brexit, Nigel Farage du parti anti-Europe et anti-immigration Ukip, a réclamé un «gouvernement Brexit» à la suite du vote. Mais s’il devra tenir compte du résultat des urnes et du désaveu des Britanniques, le Premier ministre David Cameron ne compte pas démissionner. «Il va appliquer la décision du peuple britannique. Il a été très clair qu'il allait continuer et il le fera», a déclaré le chef de la diplomatie britannique, Philip Hammond à la chaîne Sky News. David Cameron, qui a défendu ardemment un maintien dans l'UE, devait s'exprimer plus tard dans la matinée. Il se juge le plus à même de gérer les semaines à venir.
La suite, mode d’emploi
Que se passera-t-il ? Quelle est la procédure ? Aussi violent que soit le choc,
le référendum n’est pas contraignant. Pour permettre au Brexit de devenir effectif,
le résultat des urnes devra être validé par la chambre des Lords, plutôt favorable
au maintien. Cela promet d’être houleux, mais on voit mal les parlementaires voter
contre l’avis du peuple.
Le vote acquis, le Premier ministre britannique devra activer l’article 50 du Traité de
Lisbonne de 2009 qui édicte les conditions de sortie d’un État membre de l’UE. Londres
et Bruxelles plongeront alors dans un vaste brouillard politico-juridique. Ils ont
deux ans pour s’accorder non seulement sur les conditions du départ britannique, mais
aussi sur leurs relations futures.
Si certains se demandent ce que deviendront les eurodéputés britanniques, les liens
économiques entre le Royaume-Uni et l’UE sont l’épicentre des préoccupations comme
le montrent d’ailleurs l’instabilité provoquer par les résultats du scrutin sur les
différentes places boursières dans le monde.
Chute des bourses
Vendredi matin, la bourse de Hong Kong a plongé de près de 5 %, tandis qu’au Japon (-7,92 % pour le Nikkei), le ministre des Finances s’est dit prêt à agir pour calmer les marchés. Le pire se jouera en Europe. Selon Bloomberg, les bourses européennes devraient chuter de 10%. Les investisseurs se ruaient eux vendredi matin sur les titres de dette allemande, le fameux Bund, en quête d'une valeur refuge après le choc causé par la décision des électeurs britanniques de quitter l'Union européenne. A l'ouverture du marché obligataire, le rendement du Bund allemand (obligations à 10 ans) s'effondrait sous le coup de l'appétit des investisseurs à -0,140 % tandis que les titres de dette des pays les plus fragiles de la zone euro étaient délaissés, le titre grec s'envolait par exemple à 9,384%
Londres aura-t-il accès au marché unique ?
Plusieurs scénarios se dessinent. Londres pourrait rejoindre l’Espace économique européen (EEE), comme la Norvège ; suivre l’exemple de la Suisse, qui a conclu plus d’une centaine d’accords bilatéraux avec l’UE ; conclure une union douanière avec Bruxelles, comme la Turquie, ou un accord de libre-échange ou encore se contenter d’être un État tiers et suivre les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans ses relations avec l’UE.
Quand l’accord de retrait entrera finalement en vigueur, les traités européens ne seront plus applicables outre-manche. Il restera un travail titanesque à Westminster. Les députés devront définir ce qu’ils faudra garder ou rejeter de la législation européenne.
Un jour triste pour l’Europe
À 10h30, les responsables de l'Union européenne vont se retrouver à Bruxelles : Jean-Claude Juncker,
le président de la Commission, Martin Schulz du Parlement et Donald Tusk du Conseil
européen pour donner de nouvelles perspectives au projet européen.
Martin Schulz souhaite s’entretenir avec la chancelière allemande Angela Merkel pour
éviter une réaction en chaîne. L’Allemagne qui a d’ailleurs réagit ce matin. Le chef
de sa diplomatie dénonce un jour triste pour la Grande-Bretagne et l’Europe. La France
regrette ce vote et appelle l'Europe à «réagir» pour «retrouver la confiance
des peuples», affirme le ministre français des Affaires étrangères. François
Hollande et Angela Merkel pourraient se retrouver ce week-end.
Portés par le scrutin britanniques, les eurosceptiques européens et membre des partis
d’extrême droite se déchaînent. Le député néerlandais Geert Wilders et la chef du Front
national en France, Marine Le Pen demandent des référendums pour leurs pays respectifs.
Églises européennes
Avant le scrutin, l’Église catholique et la communion anglicane avaient publié
un document commun, intitulé «pense, prie, vote». Sans se positionner sur
la question, elles appelaient les citoyens à ne pas sous-évaluer la portée historique
de ce référendum. En Irlande du Nord, les évêques s’étaient prononcé eux contre le Brexit.
L’Europe a besoin d’une «nouvelle vision» affirmait la Conférence des Églises d’Europe (CEC), l’organisme qui réunit
les Églises chrétiennes de traditions orthodoxe, protestante et anglicane. Dans une
lettre ouverte envoyée à leurs communautés et organisations, elles invitaient à «une discussion
sur le futur de l’Europe et sur le rôle des Églises dans ce processus».
(MD)
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