2016-12-30 16:47:00

Jubilé, voyages, œcuménisme : retour sur l'année 2016 du Pape François


(RV) Audiences, Angélus, célébrations eucharistiques ou Jubilés thématiques. Cette année, 3,9 millions de fidèles ont participé à des événements en présence du Pape François à Rome. C’est ce qu’indique ce vendredi 29 décembre 2016 la Préfecture de la Maison pontificale.

Quels ont été les grands rendez-vous de cette année 2016 : les rencontres marquantes du Pape François ou les changements notables au Vatican ? Ce fut d’abord une Année sainte extraordinaire de la Miséricorde.

Cette rétrospective a étè préparée par Marie Duhamel

La réussite du Jubilé de la Miséricorde

Avant de refermer les battants de la Porte Sainte, le 20 novembre dernier, le Pape s’est recueilli en silence au seuil de l’imposante porte de bronze. En un an, plus de 21 millions de pèlerins venant de 156 pays l’ont traversée. Dans le monde, près de 950 millions de catholiques ont franchi une Porte sainte dans 3 000 diocèses ou sanctuaires. Mais ce ne sont pas ces chiffres impressionnants qui ont rendu cette année jubilaire exceptionnelle selon Mgr Rino Fisichella, le président du Conseil pontifical pour la Nouvelle Evangélisation.

«Je pense que vraiment l’Église dans le monde entier a vécu un moment très fort de grâce, parce que l’on a découvert la tendresse de Dieu. La tendresse devient aujourd’hui dans un contexte général de violence et d’arrogance, le désir que chacun garde dans le plus profond de son cœur. On ne peut pas oublier en cette année sainte , les vendredis de la miséricorde. Le Saint-Père a visité les nouvelles pauvreté de la société d’aujourd’hui. Ce sont des signes donnés à l’Église a nous évêques, aus prêtres, à notre communauté paroissiale, le nécessité de voir que Dieu est proche  et que tous ceux qui ont besoin de consolation peuvent trouver une main qui est donnée pour aider. La miséricorde vécu dans le Jubilé a été un signe de conversion pastorale, il faut maintenant voir comment on peut vivre de cette expérience» affirme le grand organisateur du Jubilé.

Et pour aider les fidèles à regarder vers l’avant, le Pape leur a remis une lettre apostolique Misericordia et Misera à l’issue de la messe de clôture du Jubilé.

«Même si la Porte sainte se ferme, la vraie porte de la miséricorde, le cœur du Christ, nous reste toujours ouvert», assurait le Pape dans son homélie.

Dans sa lettre apostolique, François prolonge le mandat des missionnaires de la miséricorde, pérennise la possibilité pour tous les prêtres d'absoudre l'avortement, il prolonge la validité des absolutions délivrées par les prêtres intégristes de la Fraternité Saint-Pie-X. La miséricorde ne saurait être «une parenthèse dans la vie de l’Eglise», c’est une de ses clés de voûte.

Mère Teresa canonisée

Ce fut un des évènements les plus significatifs de cette année jubilaire. Sous les applaudissements de plus de 120 000 personnes, catholiques enjoués ou Sikh enturbannés, le 4 septembre dernier, le Pape a inscrit Mère Teresa au catalogue des saints.

«Amour, passion, charité, aide aux pauvres ! Son humilité et sa simplicité nous inspirent (…) Pour elle, c’était l’humanité qui comptait, pas la religion ; nous appartenons tous à une seule famille», s’exclament quelques Indiens présents place Saint-Pierre. C’est une de leur mère qu’on canonise, mais la courageuse des bidonvilles de Calcutta est aujourd’hui la sainte de tous, de ceux qui errent dans la nuit du doute, et de ceux qui portent la lumière de l’espérance.

Guérir les blessures des familles

C’était un document très attendu, la synthèse des deux synodes sur la famille qui se sont déroulés en octobre 2014 puis 2015 au Vatican. En avril dernier, le Pape a publié  Amoris Laetitia, «la joie de l’Amour». Il y parle des défis de la famille, y développe longuement l’amour dans le mariage ou la fécondité de cet amour familial. Cette exhortation apostolique, un document très dense de plus de 300 paragraphes, fixe les orientations de la pastorale familiale de l’Église catholique en ce début de XXI° siècle. C’est une sorte de pédagogie de la famille, selon le cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne en Autriche et président du cercle germanophone lors des Synodes sur la famille.

«Le Pape François est jésuite. Il a exercé la fonction de pédagogue et on le sent. Lisez le chapitre 5 sur l’éducation et mettez-le en rapport avec le chapitre huit sur la manière d’accompagner les situations irrégulières. Et vous verrez qu’il y a une grande proximité sur ce qu’il dit sur l’éducation de la conscience. Il ne faut pas penser que celle-ci s’éduque en mettant partout des panneaux d’avertissement, mais en l’éveillant. Donc pour moi le terme clé de ce document c’est l’accompagnement, cette attitude pédagogique d’un père envers ses enfants, d’un maître qui accompagne  des jeunes dans la croissance.»

«Il le dit explicitement. Il dit : je comprends ceux qui veulent se cacher derrière des règles sûres, mais je préfère une église qui sort, qui se salit les souliers dans la boue. C’est bien d’avoir la clarté sur les normes, mais d’abord il faut rencontrer des personnes dans leurs vies, dans leurs situations. Ce n’est pas une éthique, une morale de la situation, mais c’est une morale qui est attentive aux innombrables diversités de situations, parce que chaque histoire est unique et chaque personne mérite qu’on la considère dans sa vie concrète.»

Des gestes de tendresse et de compassion

«Tanti auguri Papa Francesco ! Joyeux anniversaire Pape François». Il se souhaite une vieillesse «tranquille et religieuse, féconde mais aussi joyeuse». Pour ses 80 ans, François a tenu à prendre son petit déjeuner, entouré de 8 sans-abris. Il reste fidèle à son aspiration originelle : faire de l’Église, une mère offrant sa caresse à celui qui a besoin de consolation. C’est dans cet esprit que le Pape s’est rendu en Ombrie auprès des populations italiennes éprouvées par une série de tremblements de terre, ou dans un camp de réfugiés de l’île grecque de Lesbos. Ému par tant de souffrances, François a décidé d’offrir l’hospitalité du Vatican à trois familles musulmanes de Syrie qui s’y trouvaient. Nour. réfugiée syrienne, était à bord de l’avion du Pape avec son mari, ingénieur comme elle, et leur fils de 2 ans.

«Je voudrais bien remercier le Pape pour son geste, parce qu’il n’y a pas un homme religieux musulman, pas un président arabe qui a fait la même chose. Pourtant on dit qu’on partage les mêmes choses. On partage la langue, on partage leur religion mais il n’y a pas un hommes religieux ou un président arabe qui a senti nos souffrances, Il y a seulement le Pape qui a prié pour nous qui a senti nos souffrances qui est allé à Lesbos pour voir ce qui s’est passé. Donc merci, merci, merci de nous sauver».

Des rencontres importantes pour l'unité des chrétiens

Lesbos, c’était également le fruit d’une volonté commune du Pape, du patriarche de Constantinople Bartholomée et de l’archevêque grec-orthodoxe d’Athènes Hiérominos. Ensemble, les dignitaires chrétiens ont appelé les dirigeants politiques à répondre avec courage à cette crise humanitaire massive. Ensemble, ils ont plaidé pour la fin de la guerre et de la violence au Moyen-Orient. Un appel déjà formulé le 12 février 2016. A l’aéroport de la Havane à Cuba, le Pape s’est entretenu avec le patriarche de Moscou et de toutes les Russies, Kirill. Une rencontre historique préparée depuis des décennies. Le père Hyacinthe Destivelle, dominicain, est responsable à Rome de la section orientale du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens.

«C’est une rencontre qui est désirée et préparée depuis très longtemps. Il y avait des projets quasiment depuis 25 ans qui n’ont jamais pu aboutir. Donc cette rencontre est le fruit d’un long travail et qu’une intensification des relations ces dernières années, en particulier depuis le pontificat du Pape François. Ce qui avait empêché cette rencontre, c’était un certain nombre de peurs de la part du patriarcat de Moscou. La peur du prosélytisme catholique en Russie et la peur de la méthode de "l’uniatisme" qui consiste dans le  rattachement de partie de l’Église orthodoxe à l’Église catholique, notamment en Ukraine. Je pense que ces peurs ont été dépassées, et l’Église orthodoxe russe s’est rendu compte qu’il n’y avait nul désir de prosélytisme de la part des catholiques, ni de reprendre la méthode de l’uniatisme. Maintenant l’Église promeut une nouvelle méthode d’unité : une méthode œcuménique, c’est-à-dire une méthode qui ne consiste pas en un rattachement mais qui est un chemin que nous faisons ensemble. Un chemin de fraternité, de collaboration, de dialogue théologique, de charité.  Toute l’idée de cette rencontre est de dire que nous ne sommes pas concurrents, mais frères.»

2016, une année décidément œcuménique, puisque le 31 octobre dernier, en Suède, le Pape a participé, aux côtés des leaders de la Fédération luthérienne mondiale, à la commémoration du 5° centenaire de la Réforme. Une commémoration commune inédite, fruit là encore d’un dialogue amorcé il y a 50 ans. André Birmelé, pasteur et théologien luthérien. Il travaille depuis 1974 au centre d’Études œcuméniques de Strasbourg, où il est en charge du dialogue avec l’Église catholique.

«Il est décidé en avril 1966 d’un dialogue systématique. Et très très rapidement, on est d’accord sur la compréhension du Salut, l’enjeu du XVI° siècle. L’accord est assez rapide, et alors c’est l’initiative politique de Jean Paul II qui est très importante. Il demande qu’il n’y ait pas un résultat de dialogue, mais une déclaration officiellement signée conjointe sur le Salut. Il demande à ce qu’elle soit signée avant la fin du millénaire. C’est la raison pour laquelle cet accord est signé le 31 octobre 1999. Depuis cette date, il y a un fondement commun officiellement reçu par les magistères des deux Églises, et c’est sur cette base-là que nous travaillons à présent. Nous ne sommes plus dans une situation d’opposition, mais de consensus fondamental. C’est la raison pour laquelle le Jubilé de 2017 se présente sous de tous nouveaux aspects qui n’ont plus rien à voir avec les célébrations des centenaires précédents.»

Avec le Pape François, l’Église concrétise des années de dialogue  avec les chrétiens, mais également avec les bouddhistes ou les musulmans. Trente ans après Jean Paul II, le 20 septembre dernier, il a rassemblé des dignitaires de huit confessions à Assise, convaincu du lien indissoluble entre la paix et un authentique engagement religieux. «Jamais une guerre n’est sainte»,  clamait alors François. Avec le Grand Imam de l’université d’al-Azhar, la plus haute autorité de l’islam sunnite, ils avaient déjà condamné en mai la violence commise au nom de Dieu.

Les femmes au cœur des attentions du Pape François

François au Vatican, ce fut également en 2016, un changement dans le Missel Romain : le jeudi Saint, les femmes pourront désormais être, elles aussi, choisies pour le rite du lavement des pieds. Autre décret : sur volonté du Pape, la mémoire liturgique de Sainte Marie-Madeleine a été élevée au rang de fête dans le calendrier romain. François a été le premier depuis Pie XII à publier cette année une constitution apostolique consacrée à la vie contemplative féminine : Vultum Dei Quaerere, "à la recherche du Visage de Dieu". Mgr José Rodriguez Carballo, O.F.M., secrétaire de la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique

«Il y a des éléments concrets très importants pour la vie de clôture. Chaque monastère pourra proposer à la Congrégation une forme concrète de clôture, pour la vivre. Après il y a des éléments importants concernant la formation ou les liaisons entre le monastère contemplatif et l’ordre masculin, pour maintenir l’esprit et le charisme. Et il y a aussi des choses sur la mission des contemplatives. Non pas pour qu’elles sortent de leur monastère, mais pour qu’elles aient une mission concrète dans la vie de l’Église et du monde. La Constitution répond aux exigences de la vie contemplative d’aujourd’hui.»

Internationalisation et réforme de la Curie

Cette année, le Saint-Siège a également signé plusieurs accords cadre avec le Timor, le Bénin, la RDC et la RCA. La Centrafrique qui compte son premier cardinal. Le 19 novembre dernier, l’archevêque de Bangui le nonce en Syrie, l’archevêque de Port Louis ou de Bruxelles ont reçu la barrette cardinalice. Le collège des cardinaux compte désormais 120 électeurs pour un total de 228 membres.

Enfin, changements de taille au sein de la Curie. Le 1er septembre dernier, on a assisté à la naissance d’un dicastère pour "les laïcs, la famille et la vie". A partir du 1er janvier prochain, les conseils pontificaux Justice et Paix, Cor Unum, en charge de la pastorale de la santé et des migrants fusionneront en un dicastère unique pour "le développement humain intégral".

(CV-MD)








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