2017-07-15 08:08:00

Dérive autoritaire en Turquie, pays divisé un an après le putsch raté


(RV) Entretien - Il y a tout juste un an en Turquie, dans la nuit du 15 au 16 juillet 2016, un groupe de militaires, prétendant agir au nom de l’état-major turc, attaque le palais présidentiel et le Parlement à Ankara. Ils déclarent l’instauration de la loi martiale pour « rétablir la démocratie » dans le pays. 
Avant de rentrer d’urgence de son lieu de villégiature sur la mer Egée, le président Erdogan appelle alors à la mobilisation populaire, en direct sur CNN turk via son smartphone, pour faire obstacle aux putschistes. À Ankara ou Istanbul, en une nuit, les affrontements entre les mutins et les loyalistes se soldent par un échec du coup d’état, et la mort de plus 250 personnes. On compte plus de 1 400 blessés. 

Ali Kazancigil est politologue, journaliste, il a dirigé le programme des sciences sociales et humaines à l'Unesco, et il est le co-directeur de la revue géopolitique Anatolie. Interrogé par Marie Duhamel, il revient sur les circonstances du coup d’état, et sur ses conséquences. 


L’été dernier, immédiatement, le président Erdogan désigne un coupable au putsch raté, le mouvement de Fetullah Gülen. Tous ceux qui seront soupçonnés d’être proches de cet imam en exil aux Etats-Unis et ancien allié de Recep Tayyip Erdogan seront entravés par le pouvoir. Ce sera le début d’une longue répression. 

Près de 110 000 fonctionnaires ont été suspendus ou radiés. Près de cent médias suspendus. Des centaines de militaires, de journalistes, d’universitaires, mais également la plupart des dirigeants du parti kurde, le HDP, sont arrêtés et mis en prison. 50 000 turcs au total. Un « Etat d’exception permanent » est instauré.

En avril dernier, le président renforce encore son pouvoir. Il obtient 51,41 % des voix lors d’un référendum populaire. La réforme de la constitution entrera en vigueur en 2019. Elle prévoit une transition du régime parlementaire à un régime présidentiel. Le chef de l’Etat nommera et destituera les juges. Il pourra poser son veto aux lois votées par les députés, choisir les candidats sur les listes de son parti dont il peut désormais devenir président. Enfin, le poste de Premier ministre n’existe plus.

Si la majorité des Turcs soutiennent l’Akp et leur président, d’autres s’inquiètent pour leur sécurité, pour le maintien de leur mode de vie, pour l’Etat de droit dans leur pays. Après la première condamnation en justice d’un député du parti kémaliste, le chef du Parti républicain du peuple (CHP) a entamé le 15 juin dernier une marche d’Ankara à Istanbul pour réclamer justice. Après 25 jours de marche, Kemal Kiliçdaroglu est arrivé à Istanbul, rassemblant autour de lui des centaines de milliers d'opposants au régime en place. Ils ont défilé pacifiquement sous le regard vigilant des forces de l’ordre.

(MD)








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