2017-11-25 12:59:00

Attentat en Egypte: le cardinal Tauran évoque «un pas de plus vers l’abîme»


(RV) Entretien - L’Egypte pleure ses morts au lendemain d’une attaque contre une mosquée soufie dans le nord du Sinaï, ce 24 novembre 2017, lors de la grande prière du vendredi. Le bilan des victimes est extrêmement lourd:  plus de 300 morts et des centaines de blessés. Des hommes armés ont déclenché une explosion visant la mosquée al-Rawda de Bir al-Abd, avant de tirer sur les fidèles qui tentaient de fuir. Il s’agit de l’attaque la plus meurtrière de l’histoire moderne de l’Egypte. La présidence a déclaré trois jours de deuil national.

Le cardinal Jean-Louis Tauran a souhaité s’exprimer après ce drame. Le président du Conseil Pontifical pour le dialogue interreligieux exprime ses condoléances «aux familles qui pleurent leurs morts». «Aucune cause ne peut justifier un tel massacre», déclare t-il avec force, exhortant «tous ceux qui croient à ne pas céder à la haine, à la peur et au pessimisme».

Des propos recueillis par Hélène Destombes

Entretien avec le cardinal Tauran, président du Conseil Pontifical pour le dialogue interreligieux

Je voudrais exprimer au nom du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux nos condoléances aux familles qui pleurent leurs morts. Je voudrais aussi exprimer notre solidarité pour les blessés. Evidemment aucune cause ne peut justifier un tel massacre. Nous avons fait un pas de plus vers l’abîme. Nous ne répèterons jamais assez que le terrorisme est un choix pervers et cruel, d’autant plus blâmable quand les victimes sont des personnes en prière dans un lieu de culte.

Récemment, le Pape et le grand imam d’Al-Azar se sont rencontrés deux fois, et souvenons-nous de ce qu’ils nous ont dit. Il faut que tous ceux qui croient, que tous les hommes qui ne constituent qu’une seule communauté, comme le dit la déclaration Nostra Ætate, ne cèdent pas à la haine, à la peur et au pessimisme. Chrétiens et musulmans, nous savons que seuls la prière, le dialogue et l’éducation, peuvent changer les cœurs pour un avenir reposant sur le respect réciproque, la liberté et la solidarité.

L’ensemble du peuple égyptien veut la paix, comme tous les peuples de la terre. C’est un peuple qui a une grande tradition intellectuelle et civilisatrice. Cet attentat est aussi une humiliation pour le pays.

Cette attaque touche-t-elle les efforts faits jusqu’à présents en faveur du dialogue interreligieux ?

Le dialogue interreligieux en est fragilisé. Tout le monde dit : «Vous parlez autour d’une table et regardez ce qu’il se passe sur le terrain». On peut être accusé de naïveté mais le choix est très simple: le dialogue ou la guerre.

En ces heures tragiques, quels sont les messages d’espérance et d’encouragement que l’on peut adresser au peuple égyptien, et à l’ensemble des chrétiens et des musulmans ?

Ne pas céder à la haine, ni au pessimisme, mais renouveler au contraire nos contacts. Prier et éduquer la jeunesse. Plus la violence semble vaincre, plus il faut que les œuvres de bien se multiplient. L’heure n’est pas au pessimisme mais au contraire au dialogue toujours plus intense, avec une bonne formation pour pouvoir répondre, expliquer, se parler, s’écouter et se regarder. Il n’y a pas d’autres moyens.








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